Nous recherchons et sélectionnons les experts les plus adaptés à vos besoins.
Le changement climatique, l’anticipation et l’action avec Antoine Denoix
Retrouvez notre interview d’Antoine Denoix sur le changement climatique
Antoine Denoix, CEO d’AXA Climate. Un digital native passé de la transformation digitale à la transformation environnementale.
Retrouvez notre résumé des échanges entre Julie Huguet et Antoine Denoix.
Julie Huguet : Comme tout change maker, je pense que tu es parti d’un constat, un ras-le-bol. Qu’est ce qui t’a poussé au sein d’un grand groupe comme AXA à te lancer dans un projet d’entrepreneuriat ?
Antoine Denoix : Je fait partie de cette génération de la transformation digitale : comment transformer une entreprise, créer des applications mobiles, digitaliser les parcours… et je suis arrivé il y a trois ou quatre ans, à la fin d’un cycle. Il y a quelque chose qui me manquait dans cette transformation digitale : le sens. Et j’ai réussi à switcher, à passer de la thématique digitale à la thématique environnementale et donc à lancer une aventure qui réconcilie transformation, innovation et plus de sens.
Julie Huguet : Quand tu t’es lancé dans ce projet, qu’est-ce que tu as vraiment voulu changer ?
Antoine Denoix : J’ai eu la chance chez AXA, il y a trois ans, de reprendre un produit qui s’appelait l’assurance paramétrique. Maintenant, l’assureur avec les données satellites, est capable de déclencher des paiements au bout de quelques heures de manière extrêmement rapide, sans envoyer des experts sur le terrain. Cela marche pour les inondations, pour les tremblements de terre… Et donc, mon intuition de départ était de me dire que si je voulais m’attaquer au climat, j’avais intérêt à partir de ce produit paramétrique qui existe et en faire quelque chose d’autre.
Le raisonnement qui a été le mien au départ d’AXA Climate, cela a été de me dire comment je pars d’un choc de simplification technologique, le satellite, et comment je tire une nouvelle entreprise qui va engager l’assureur sur les différentes composantes de son métier.
Trois ans après AXA Climate, c’est 100 personnes, et c’est beaucoup d’autres activités que l’assurance. On a dépassé l’assurance à partir du moment où la mission que l’on s’est donnée est l’adaptation climatique. Comment on aide, en tant assureur, les acteurs qui nous entourent, les grandes entreprises et les institutions publiques à s’adapter à un climat qui a déjà changé. Donc très concrètement, on continue à faire de l’assurance paramétrique. Mais on est aussi un assureur qui forme. On a lancé un grand programme, une grande plateforme de contenus digitaux autour des enjeux environnementaux. On accompagne plus de 500.000 collaborateurs en dehors d’Axa qui ont accès à nos contenus. On travaille avec une quinzaine de grandes entreprises, dont 5 ou 6 du CAC40. Qui aurait dit, il y a trois ans, que AXA formerait d’autres entreprises à ces thématiques ? AXA Climate a également lancé un business de conseil. En fait, on projette les entreprises en 2030. Et on fait tourner des modèles climatiques. Ce sont des questions hyper concrètes. Vous avez un projet d’infrastructures sur le littoral français. Est-ce que la montée des eaux à venir risque de vous mettre en danger ?
Julie Huguet : Comme tu le disais, il y a trois ans, personne n’aurait pensé qu’AXA lancerait ce type de projets. Est-ce que tu as dû convaincre en interne pour embarquer tous ces gens avec toi, de te suivre sur ce pari ?
Antoine Denoix : Avec le temps, je suis devenu assez puriste et assez radical dans ma conception de l’innovation. Pour caricaturer, pour moi, il y a deux chemins d’innovation auxquels je ne voulais plus toucher : la start-up dans le garage qui va manquer l’impact, et l’innovation dans l’entité opérationnelle d’un grand groupe qui prend le risque d’être étouffé et d’être marginalisé. Avec AXA Climate j’ai réussi à convaincre AXA d’une troisième voie Je reste dans le grand groupe, donc mon actionnaire est AXA, mais j’ai une grande indépendance, une grande autonomie sur la RH et la finance, donc en gardant complètement l’agilité d’une petite structure. AXA Climate, c’est une culture hyper chouette parce que globalement, on n’a pas de performance individuelle, on n’a pas de management, c’est à dire qu’on fonctionne complètement, sans organigramme.
Julie Huguet : Vous avez pu même innover finalement même sur la culture…
Antoine Denoix : Oui, c’est une autre de mes grandes convictions. La transition environnementale, c’est un sujet de collaboration. Si on veut pousser l’intelligence collective en dehors, il faut la concevoir aussi comme cela en interne. Et puis surtout, on fait éclater la frontière entre le collaborateur interne et collaborateur externe. Notre vraie conviction et ce qu’on a envie de construire c’est un modèle de société élargie où on fait bosser des scientifiques dans tous les coins du monde, des freelance sur toutes nos questions, y compris sur le carbone.
Julie Huguet : J’ai envie te poser une dernière question et de revenir un peu sur l’enjeu du climat pour toi dans 10 ans ? Qu’est ce qui doit changer ? Et qu’est-ce qui aura peut-être déjà changé ?
Antoine Denoix : J’ai un regard et un avis probablement biaisés. Mais je pense que la transition environnementale va tout balayer en transverse dans toutes les entreprises, à toutes les strates politiques. Je pense que c’est le sujet majeur avec un impact sur tous les métiers. On ne peut pas travailler en finance, si on ne sait pas ce que c’est que la régulation, la réglementation, la triple comptabilité naturelle. On ne peut pas travailler en IT, si on n’a pas une appréciation de l’émission carbone, on ne peut pas travailler sur la supply chain, si on n’a pas compris qu’on était aussi responsable en tant qu’entreprise de l’ensemble des fournisseurs. Tous ces enjeux d’environnement induisent une intelligence collective, une nouvelle façon de fonctionner qui va balayer tous les métiers. Donc moi, si j’ai un conseil de vieux sage que je ne suis pas à donner à ceux qui nous écoutent, c’est de se mettre sérieusement sur des sujets qui sont en plus passionnants… Il y a trois ans, j’ai découvert comment fonctionnait la montée des eaux, ce qu’était un ouragan, comment ça s’explique. On est repris dans le réel et dans le matériel, et cela a un côté très enivrant. On n’est plus face à l’écran. Il y a un côté très incarné qui est très sympa et qui permet aussi de se connecter à ce qu’on a dans le ventre.
Retrouvez Antoine Denoix sur LinkedIn.